- TOPIQUE (psychanalyse)
- TOPIQUE (psychanalyse)TOPIQUE, psychanalyseDans la théorie psychanalytique de Freud, on distingue couramment deux topiques successives ou conceptions des lieux psychiques. La première topique, élaborée à partir de 1900, distingue métaphoriquement dans l’appareil psychique: l’inconscient, le préconscient et le conscient; la seconde, qui date de 1923, distingue le ça, le moi et le surmoi. Chacun de ces lieux ou chacune de ces instances psychiques se caractérise par un certain nombre de traits et de fonctions différents.Dès les Études sur l’hystérie , Freud remarque que la conception de l’inconscient impose l’existence d’une topique différenciée de l’appareil psychique et, pour l’inconscient lui-même, l’existence de couches multiples organisées. «J’ai indiqué, écrit-il, que le groupement de ces sortes de souvenirs [que l’investigation analytique met au jour] en une pluralité d’assises, de strates linéaires, se présentait comme un dossier d’actes, un paquet, etc., et caractérisait la formation d’un thème . Ces thèmes sont autrement groupés encore, ce que je ne saurais décrire qu’en disant qu’ils sont concentriquement disposés autour du noyau pathogène.» La première topique est exposée dans l’Interprétation des rêves (VII). Les trois systèmes possèdent chacun sa fonction, son type de processus, son énergie d’investissement; leurs contenus représentatifs sont spécifiques. Le conscient représente pour ainsi dire le système mnésique situé à la surface de l’appareil; celui-ci est inconscient dans sa majeure partie, mais à deux niveaux de profondeur — préconscient et inconscient proprement dit. La loi fonctionnelle qui régit l’inconscient, c’est celle de la mobilité des intensités d’investissement, alliée au fait qu’une même charge d’investissement se déplace d’une représentation à une autre ou que plusieurs charges d’investissement se condensent sur une même représentation. L’inconscient contient une énergie mobile, tandis que le préconscient contient une énergie liée. L’inconscient renferme les investissements des choses; dans le préconscient, la représentation des choses est surinvestie en vertu de la liaison qui a été nouée avec la représentation verbale correspondante.Dans la nouvelle théorie qu’il donne de l’appareil mental en 1923, Freud distingue le ça, le moi et le surmoi. Le ça, réservoir des pulsions, des énergies inconscientes et des désirs refoulés, existe seul lors de la naissance de l’être humain. «Son contenu comprend tout ce que l’être apporte en naissant, tout ce qui a été constitutionnellement déterminé, donc avant tout les pulsions émanées de l’organisation somatique et qui trouvent dans le ça, sous des formes qui nous restent inconnues, un premier mode d’expression psychique» (Abrégé de psychanalyse , 1938). Le moi, qui contrôle la conscience et les mouvements volontaires, naît du ça à partir de l’influence persistante du monde extérieur. Le surmoi, enfin, est l’expression des interdits parentaux de l’enfance; il juge et critique en fonction de ces exigences passées.Telle est donc, schématiquement présentée, la seconde topique. Mais à quoi répond son élaboration et quels sont ses rapports avec la précédente? Dans la première topique, les mécanismes de défense — soit les forces qui sont au service du refoulement — agissent de façon inconsciente. Il s’ensuit que tout ce qui est inconscient n’est pas forcément du refoulé. Aussi, dans la seconde topique, le ça assume-t-il cette fonction active. Comme le moi est une différenciation du ça, le surmoi différencie une partie du moi; il provient de l’intériorisation des images parentales, des objets primitifs d’amour, idéalisés à la suite du conflit œdipien. D’une telle identification naît la conscience morale, avec notamment l’estime de soi-même et les sentiments de culpabilité. Entre moi et surmoi s’établissent des rapports complexes qui ont pour but d’assurer la défense contre les pulsions et les désirs refoulés du ça. Moi et surmoi résistent au ça. Comme ces résistances sont inconscientes, c’est donc que moi et surmoi ne s’identifient pas au conscient de la première topique. Il y a une appartenance à l’inconscient et au préconscient du moi et du surmoi, même si l’inconscient est la qualité dominante du ça: «L’intérieur du moi, qui comprend avant tout les processus cogitatifs, possède la qualité de préconscience. Cette dernière caractérise le moi et lui revient exclusivement. Il ne serait pourtant pas juste de poser le lien avec les traces mnémoniques de la parole comme condition de l’état préconscient, celui-ci est bien plutôt indépendant d’une telle condition, bien que le fait qu’un processus soit conditionné par la parole permette de conclure à coup sûr que ce processus est de nature préconsciente. L’état préconscient, caractérisé d’un côté par son accession à la conscience, d’un autre côté par sa liaison avec les traces verbales, est bien quelque chose de particulier, dont la nature n’est pas épuisée par ces deux caractères. Ce qui le prouve, c’est que de grands fragments du moi et surtout du surmoi, auquel on ne saurait contester un caractère de préconscience, restent en général inconscients, phénoménologiquement parlant» (Abrégé de psychanalyse ).D’un certain point de vue, on dira que du ça primitif, immergé dans le biologique, ont émergé progressivement les deux autres instances, moi et surmoi: «Tout ce qui est conscient a d’abord été inconscient.» Ici, inconscient est adjectif. D’un autre point de vue, complémentaire du premier, l’inconscient (ici, pris substantivement) est constitué par le processus de refoulement (d’où le postulat d’un refoulement originaire). À partir de la seconde topique — et c’est là une de ses qualités —, on parvient à différencier des relations intrasystémiques (idéal du moi, moi idéal, etc.), à côté des relations intersystémiques.
Encyclopédie Universelle. 2012.